Ce fut un été plein de rebondissements. Il existe un dicton courant parmi les investisseurs : « vendez en mai et partez ». Bien que ce ne soit pas statistiquement tout à fait exact, il existe une croyance selon laquelle les marchés boursiers sous-performent entre mai et octobre. Cette année, cette philosophie aurait épargné aux investisseurs le repli du mois de juin, mais immédiatement après, ils auraient manqué la hausse du mois de juillet. Il est à noter que le cours de clôture du dernier jour de bourse d’avril pour l'indice S&P 500, qui était de 4131, se situait à moins de un pour cent de celui du 24 août (4140). Malheureusement, depuis lors, l’indice S&P 500 a abandonné une partie des gains réalisés, à la suite du discours de Jerome Powell à Jackson Hole. Parfois ça fonctionne, parfois non. Ce qui prouve que tenter d’entrer et de sortir du marché au meilleur moment est souvent un piège.
Les investisseurs qui ont fermé les livres pour l’été reviennent de vacances avec de nombreuses données à assimiler. De l’inflation à l’évolution des tendances de consommation, de l’immobilier aux prix de l’énergie, beaucoup de choses se sont passées en quelques mois, et beaucoup d’autres restent à venir. La Banque du Canada et la Réserve fédérale américaine tiendront chacune une réunion en septembre, et les élections américaines de mi-mandat auront lieu en novembre.
D’un point de vue économique, il convient de rappeler que la consommation représente une part énorme de 70 % de l’économie américaine. L’inflation a donc certainement un impact sur le consommateur. Mais dans quelle mesure? Prodco est une société qui mesure l’achalandage dans les magasins par le biais de capteurs installés aux portes. Pour la semaine se terminant le 19 août, qui reflète les dépenses de la rentrée scolaire, on a constaté une augmentation de 15 % de l’achalandage dans les magasins de vêtements par rapport à l’année dernière.
Bien que la consommation reste forte, nous avons remarqué un changement dans les habitudes de consommation. Par exemple, McDonald’s et Walmart signalent une part plus importante de gens à revenu élevé dans leur clientèle, et une part plus faible de familles à faible revenu.
Cela semble indiquer une économie où l’inflation élevée et les taux d'intérêt en hausse commencent à avoir un impact sur le consommateur. Dans le même temps, cependant, le marché du travail se maintient assez bien. Les salaires, s’ils ne progressent pas aussi vite que l’inflation, augmentent néanmoins au rythme le plus fort depuis 25 ans (selon la Federal Reserve Bank of Atlanta). Les personnes ayant un emploi continuent de dépenser. Il y a encore des pénuries pour à peu près tous les biens durables. La demande n'est pas morte.
Ceci étant dit, la question que tout le monde se pose est la suivante : « Allons-nous vers une récession? » Au fur et à mesure que l'année avance, de plus en plus de signes semblent évoquer ce mot redouté. Mais, sachant que la Fed est prête à mettre la croissance économique à risque dans le but de juguler l’inflation, la question devrait plutôt être : à quel type de récession faut-il s’attendre, si nous en avons une?
Les pires récessions ont généralement été liées à des déconfitures financières, par exemple la crise des prêts à risque de 2007 à 2009. Or, jusqu’à présent, le système financier ne semble pas particulièrement compromis. Un taux de chômage élevé est également un ingrédient essentiel d’une récession pénible. De ce côté aussi, les choses semblent tenir, les dernières données sur les emplois disponibles aux États-Unis étant beaucoup plus robustes que prévu, à plus de 11 millions.
Nous ne savons pas encore avec certitude si nous nous dirigeons vers une récession, mais si c’est le cas, les signes semblent indiquer un « r » minuscule plutôt qu’un « R » majuscule. Dans ce contexte, certaines catégories d'actifs nous paraissent en meilleure position que d’autres.
Le Canada risque de connaître une récession dans le secteur de l’immobilier, mais rappelons que le marché boursier canadien n’est pas la copie conforme de notre économie. Les actions canadiennes sont nettement plus arrimées à la croissance mondiale. Nous croyons que la vigueur de la demande pour les produits de base reste de bon augure pour l’indice composé S&P/TSX. Les valorisations boursières au Canada demeurent aussi très attrayantes par rapport à leur niveau historique. Ces facteurs nous amènent à voir les actions canadiennes sous un éclairage positif.
Sur les marchés américains, c’est une autre histoire; vous y trouverez toujours les meilleures entreprises du monde, mais il ne semble plus y avoir de marge de progression pour l’indice S&P 500. Des poches de valeur apparaissent dans certains secteurs, mais dans l’ensemble, les prix restent supérieurs à la moyenne. Néanmoins, la croissance des bénéfices reste positive et les entreprises envoient des signaux encourageants. Nous sommes donc prudemment optimistes et conscients du fait que les valorisations pourraient subir des vents contraires.
C’est là un contraste important par rapport à ce qui se passe en Europe, où la conjoncture économique générale est beaucoup plus difficile, ce qui se reflète toutefois dans les valorisations. L’écart entre les valorisations relatives de l’indice MSCI EAEO et du S&P 500 est important compte tenu de ses niveaux historiques, et nous pensons qu'il devrait se recentrer, ce qui créera des occasions dans les actions internationales.
En ce qui concerne les titres à revenu fixe, nous pensons que le plus difficile est en grande partie derrière nous. La hausse des taux d’intérêt entraîne une amélioration considérable des perspectives à long terme pour les obligations. Historiquement, la corrélation entre le rendement des obligations d'État à 10 ans et le rendement à 8 ans est extrêmement forte. Nous pouvons donc nous attendre à ce que les rendements moyens à long terme des titres à revenu fixe reviennent à la norme historique, autour de 5 %.
En fin de compte, les prochaines semaines et les prochains mois pourraient encore nous réserver de la volatilité. C’est un phénomène normal à cette période de l’année et compte tenu des élections à venir. D’ici la fin de l’année, nous devrions recevoir des signaux plus clairs concernant la croissance économique, ce qui en soi devrait contribuer à atténuer l’incertitude et à ramener une dose d’optimisme chez les investisseurs.